Le langage et la pensée

                                                                          LE LANGAGE

Lien entre le langage et la pensée : plus nous avons de mots, plus nous pouvons être précis dans le partage de notre pensée. Ici, la suppression du mot « exploité » permet de faire disparaître la recherche d’un « exploitant », responsable de l’exploitation. Cette évolution dans les usages des mots est une caractéristique du langage : le langage évolue avec les époques et varie selon les cultures.

Dans 1984, Orwell imagine une dictature dans laquelle un des piliers serait la réduction du langage à des mots très simples en opposition les uns avec les autres. Il appelle ce langage la « novlangue » et elle est particulièrement efficace car les hommes n’ont plus les outils pour construire une pensée complexe.

Pour bien comprendre ceci, quelques définitions sont nécessaires :

  • Le langage = instrument d’expression et de communication qui repose sur un système de signes (mots, sons, lettres, gestes…). Ces signes renvoient à un sens. Pour communiquer, autrui doit pouvoir déchiffrer dans mes signes le sens que je veux lui communiquer et inversement.
  • La langue = forme particulière que prend le langage dans un groupe donné (expl : français, arabe, langue des signes, langue informatique binaire…) ;
  • Parole = manière dont une personne use d’une certaine langue.

 

Remarque : les langues sont fondées sur certaines normes (telles qu’elles apparaissent dans l grammaire notamment) mais les personnes, en faisant usage de la langue, modifient et font évoluer ces normes (certaines formes grammaticales changent, certains mots apparaissent, d’autres disparaissent…).Expl : apparition de 150 nouveaux mots dans l’édition 2018 du dictionnaire Larousse (ubérisation, déradicalisation, hipster, disruptif, gif, spoiler…) et disparition d’autres mots, jugés trop obsolètes (claquedent = misérable, déprier = retirer une invitation, lourderie = faute contre le bon sens…).

Ainsi, le langage apparaît comme un outil que les individus d’un groupe utilisent pour exprimer leur pensée et la communiquer. Mais ce langage a de nombreuses faiblesses et peut même être trompeur : par expl, il nous manque souvent des mots pour dire exactement ce que l’on ressent ou ce que l’on vit (difficulté à décrire une douleur ou un sentiment) et autrui peut parfois mal comprendre ce que je dis car les mots sont caricaturaux (expl : si je dis de qqun qu’il est « timide », je l’enferme dans une catégorie), vagues (expl : la phrase « je vais me mettre au travail » est floue) et les mots et les phrases peuvent avoir plusieurs sens (expl : un même prénom peut renvoyer à plusieurs personnes complètement différentes).  De plus, si autrui ne partage pas la même langue que moi, il est très difficile pour nous de nous comprendre.

=>Problématique: Le langage permet-il vraiment d’exprimer ce que l’on pense ou faut-il s’en méfier car il réduit notre pensée et nous empêche d’agir ?

 I) Le langage est artificiel et il peut être source de manipulation

Dans toute forme de langage, y compris les langues non verbales, un ensemble de signes est articulé pour véhiculer un sens. Un signe est un élément concret (dessin, geste, son, mot…) qui renvoie à un autre élément, concret ou abstrait. Mais comment le signe peut-il renvoyer à un sens ?

Dans le langage verbal, un mot renvoie à une chose ou à un concept. Or, ce lien entre le mot et la chose n’est pas naturel, sauf peut-être pour le cas des onomatopées (expl : le mot « glouglou » évoque directement le son que l’on entend quand qqun boit). Le lien entre le mot et la chose est donc artificiel et arbitraire (expl : il n’y a aucune raison pour que tel animal s’appelle un « chien » et pas autre chose). Au niveau d’un groupe, on doit donc s’accorder sur les liens arbitraires établis entre les mots et les choses.

Dans son Cours de linguistique générale, Ferdinand de Saussure propose une distinction entre le « référent », le « signifié » et le « signifiant ». Le référent désigne l’objet, le signifié désigne la représentation mentale que nous nous faisons de l’objet et le signifiant désigne le mot, l’ensemble de sons choisi pour renvoyer à l’objet.

Le lien entre signifiant et référent étant arbitraire, il peut varier en fonction des cultures. Même si certaines langues ont des racines communes, les systèmes construits par les différentes langues peuvent varier du tout au tout. En effet, certains mots existent dans une langue et pas dans une autre (expl : le mot italien « abiocco » désigne l’état de somnolence ressenti après un repas copieux, le mot danois « hyggelig » désigne un endroit douillet où l’on a envie de se blottir, le mot allemand « verschlimmbessern » désigne le fait d’aggraver une situation en essayant de l’améliorer, le mot « turc « yakamov » désigne le reflet du clair de lune sur l’eau…), les systèmes d’écriture peuvent être complètement différents (alphabet grec, arabe, russe, japonais…), certaines règles grammaticales sont incompréhensibles pour d’autres cultures (expl : la différence entre le masculin et le féminin en français n’existe pas dans d’autres langues, le temps de conjugaison futur n’existe pas en japonais…).

Ainsi, l’aspect arbitraire, instable et changeant du langage contribuent à en faire un artifice qui ne peut être porteur de sens que dans un contexte très particulier. Le langage reste donc très éloigné de la réalité dans toute sa richesse et sa diversité.

De plus, le langage est souvent utilisé comme outil de tromperie. En effet, comme les mots n’ont rien à voir avec les choses qu’ils désignent mais renvoient seulement aux représentations mentales de ceux qui écoutent ou qui lisent, ils peuvent être utilisés pour influencer, voire pour manipuler autrui, en jouant sur ces représentations. Il est donc très facile d’utiliser le langage pour manipuler, pour faire croire, pour faire rêver car le rapport à la réalité n’est pas nécessaire.

Dans Gorgias, Platon distingue radicalement un bon usage du langage, dans la philosophie, et un mauvais usage du langage, dans la rhétorique. La rhétorique est l’art de bien parler, d’envouter et de persuader (manipulation par les sentiments) son auditoire par son discours. Dans le discours du rhéteur, ce qui importe, c’est la manière dont les choses sont dites, et non le contenu de ce qui est dit.

Texte de Platon, Gorgias :

« SOCRATE : je te demande depuis longtemps quelle est cette puissance de la rhétorique. Elle me paraît en effet merveilleusement grande, à l’envisager de ce point de vue.

GORGIAS : Que dirais‑tu, si tu savais tout, si tu savais qu’elle embrasse pour ainsi dire en elle-même toutes les puis­sances. Je vais t’en donner une preuve frappante. J’ai souvent accompagné mon frère et d’autres médecins chez quelqu’un de leurs malades qui refusait de boire une potion ou de se laisser amputer ou cautériser par le médecin. Or tandis que celui-ci n’arrivait pas à les persuader, je l’ai fait, moi, sans autre art que la rhétorique. Qu’un orateur et un médecin se rendent dans la ville que tu voudras, s’il faut discuter dans l’assemblée du peuple ou dans quelque autre réunion pour décider lequel des deux doit être élu comme médecin, j’affirme que le médecin ne comptera pour rien et que l’orateur sera préféré, s’il le veut. Et quel que soit l’artisan avec lequel il sera en concurrence, l’orateur se fera choisir préféra­blement à tout autre ; car il n’est pas de sujet sur lequel l’homme habile à parler ne parle devant la foule d’une manière plus persuasive que n’importe quel artisan. Telle est la puissance et la nature de la rhétorique. »

Dans ce texte, Gorgias fait un véritable éloge de la rhétorique. Cet art de bien parler a un pouvoir persuasif considérable, à tel point que le rhéteur peut parler de tout type de sujets en étant plus persuasif qu’un spécialiste de ce sujet. Il donne l’expl du médécin : le médecin tente de convaincre rationnellement son patient de prendre tel traitement, car il connait parfaitement la maladie et les effets qu’aura le médicament. Mais le discours du médecin aura beaucoup moins d’impact que celui du rhéteur qui, même s’il n’a aucune connaissance médicale, saura jouer sur les cordes sensibles du patient. Grâce à son art, le rhéteur pourra se faire passer pour compétent dans tous les domaines. Cela a pour Gorgias des implications politiques considérables : en démocratie, l’expert en politique est celui qui parle bien, celui que le peuple élira sera moins celui qui connaît différentes sciences ou qui connaît bien un pays et son peuple, que celui qui maîtrise l’art de la rhétorique. Socrate va critiquer avec véhémence cet usage dangereux du langage qui peut faire croire à n’importe quoi. Et il souligne que la rhétorique est d’autant plus dangereuse qu’elle est puissante et son effet est réel. C’est une des raisons pour lesquelles selon Platon, qui parle à travers le personnage de Socrate, la démocratie est un des pires régimes car le peuple est trop influençable et manipulable.

 

Attention : il ne s’agit pas de dire ici qu’il n’est pas important, en politique notamment, de savoir bien parler en public mais il s’agit d’être vigilant que la forme du discours reste au service du fond et ne se place pas en remplacement d’un contenu concret et intéressant. Cf. sur l’importance de la capacité à parler en public d’un homme politique : film Le discours d’un roi : le Roi anglais Georges VI doit surmonter son bégaiement et sa peur de parler en public pour donner un discours au peuple anglais afin d’exprimer son opposition radicale au régime nazi.

 

Transition : Le langage nous est donc apparu ici comme un outil redoutable permettant d’influencer l’auditoire. Dans de nombreux métiers (politiques, avocats, professeurs…), la rhétorique peut être utilisée à des fins fallacieuses de manipulation. Cependant, elle est aussi indispensable car le langage est un moyen efficace pour communiquer et pour transmettre un message, ce qui est au fondement de toute société.

 

II) Le langage est un outil de communication précieux et utile pour agir

Comme système de signes cohérent commun à un groupe d’individus, le langage n’est pas réservé à l’homme, contrairement à ce que pensait Descartes. En effet, de nombreux animaux utilisent différentes formes de langage pour faire passer des messages, car c’est indispensable à la survie de la société. Par expl, les abeilles utilisent des danses particulièrement complexes, les oiseaux chantent, les fourmis produisent des hormones, les baleines frappent la surface de l’eau avec leur nageoire pour produire différentes ondes… Le langage est donc indispensable à toutes les espèces, car il est nécessaire à la survie.

Chez les hommes, le langage est un système d’une rare richesse et complexité, capable de tendre vers une grande abstraction (expl : le langage mathématique). De l’élément le plus concret (l’ennemi qui arrive et dont il faut se méfier) aux concepts les plus abstraits (le concept de « justice »), les langues humaines permettent de communiquer des messages articulés et complexes. Le contenu de ces messages peut varier selon les cultures dans lesquelles la langue se développe (par expl, les Inuits ont une douzaine de mots pour désigner la neige et pour distinguer « la neige qui tombe », « la neige sur le sol », « la neige servant à faire de l’eau », « la neige dans laquelle on s’enfonce », « la neige sur laquelle on glisse »… alors que les français distinguent péniblement la « neige » et la « glace » car ils n’ont pas besoin de plus de nuances).

Les langues sont donc directement liées à la notion de besoin. Nous avons besoin de mots pour désigner certains objets précis et l’articulation des mots permet de faire passer des messages plus complexes.

Selon  Bergson, le langage est un outil d’action sur le monde particulièrement efficace. En effet, grâce aux mots que nous avons et que nous inventons, nous pouvons organiser le monde qui nous entoure, agir sur notre environnement et avec notre entourage. Les mots classent les objets dans des catégories : le mot « arbre » désigne une immense diversité de végétaux àpd certains points communs (végétal, racines, tronc, branches).

Texte de Bergson, La pensée et le mouvant :

« Quelle est la fonction primitive du langage ? C’est d’établir une communication en vue d’une coopération. Le langage transmet des ordres ou des avertissements. Il prescrit ou il décrit. Dans le premier cas, c’est l’appel à l’action immédiate ; dans le second, c’est le signalement de la chose ou de quelqu’une de ses propriétés, en vue de l’action future. Mais, dans un cas comme dans l’autre, la fonction est industrielle, commerciale, militaire, toujours sociale. Les choses que le langage décrit ont été découpées dans le réel par la perception humaine en vue du travail humain. Les propriétés qu’il signale sont les appels de la chose à une activité humaine. Le mot sera donc le même, comme nous le disions, quand la démarche suggérée sera la même, et notre esprit attribuera à des choses diverses la même propriété, se les représentera de la même manière, les groupera enfin sous la même idée, partout où la suggestion du même parti à trier, de la même action à faire, suscitera le même mot. Telles sont les origines du mot et de l’idée. L’un et l’autre ont sans doute évolué. Ils ne sont plus aussi grossièrement utilitaires. Ils restent utilitaires cependant. »

Dans ce texte, Bergson souligne l’utilité du langage, dans sa double dimension descriptive (« il pleut ») et prescriptive (« il faut que tu ailles prendre du pain »). Mais Bergson, sans enlever au langage sa grande force, en souligne aussi les faiblesses : en organisant le monde en catégories, le langage est schématique et réducteur. Il est incapable de désigner les choses dans leur singularité (la phrase « Je t’aime » ne permet pas de désigner exactement l’amour ressenti pour la personne. De plus, le langage immobilise le monde alors que celui-ci est en changement perpétuel (expl : pour décrire la formation d’un fruit sur un arbre, nous n’avons que des mots figés : bourgeon, fleur, fruit). Bergson dit des mots qu’ils sont comme « des étiquettes collées sur les choses ».

Le langage est donc utile en tant qu’il nous permet de décrire la réalité et de nous inviter à agir sur elle. Mais on peut ajouter que le langage peut aussi parfois être confondu avec l’action. On ne parle pas seulement avant d’agir ou après avoir agi. Parfois, parler c’est agir.

Le philosophe Jonh Austin, dans son œuvre Quand dire c’est faire, distingue 2 types d’énoncés : les « énoncés constatifs » qui sont descriptifs ou prescriptifs et les « énoncés performatifs »  qui sont en eux-mêmes des actions (expl : lorsqu’un maire dit « Je vous déclare mari et femme », son énoncé est un acte, si qqun écrit dans son testament « Je lègue ma maison à mon fils »). Les énoncés performatifs ne sont ni vrais ni faux, ils sont des actes.

 

Transition : Ainsi, nous avons vu que le langage est indispensable pour communiquer, pour transmettre un message et même pour agir. Cependant, nous avons aussi remarqué que le langage était caricatural et réducteur par rapport à la réalité et qu’un mauvais usage pouvait conduire à la manipulation d’autrui. Mais ne peut-on pas aussi souligner la richesse du langage, dans sa capacité d’évolution, dans la construction de messages complexes et dans la beauté de ses sons ?

 

III) Le langage réduit peut-être la pensée mais ce qu’il suggère peut porter un sens fort, imagé et partageable

 Certes, la faiblesse du langage est de ranger les choses singulières dans des catégories générales et abstraites. Selon Bergson, la pensée reste bien plus riche que le langage et il nous manquera toujours des mots pour décrire nos états intérieurs ou un paysage contemplé par expl (expl : quel mot utiliser pour décrire un état de tristesse mélancolique, ou pour décrire à qqun un feu d’artifice ?).

Cependant, le langage est aussi la matière que nous utilisons pour penser. Peut-on vraiment penser ce que l’on voit ou ce que l’on ressent sans mettre cette pensée dans des mots (cette petite « voie intérieure » qui nous permet de passer de la simple perception à la prise de conscience de tout ce que nous vivons).

Pour Hegel, pensée et langage sont interdépendants, indissociables et s’enrichissent mutuellement. Une pensée qui ne trouve pas les mots pour s’exprimer n’est pas assez solide et consistante. En ce sens, une pensée sans mots n’est ni assez claire ni assez forte pour s’exprimer (Cf. Boileau, Art poétique : « Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement/ Et les mots pour le dire arrivent aisément »). La pensée ne perd rien en s’inscrivant dans des mots, au contraire car elle gagne en clarté et en dignité. En effet, une fois mise en mots, la pensée peut être extériorisée et partagée, par le biais d’idées ou d’images, comme c’est souvent le cas en poésie ou dans d’autres formes d’art universel comme la peinture, la musique ou l’architecture.

Texte de Hegel, Philosophie de l’Esprit :

« C’est dans les mots que nous pensons. Nous n’avons conscience de nos pensées déterminées et réelles que lorsque nous leur donnons la forme objective, que nous les différencions de notre intériorité et par suite nous les marquons d’une forme externe, mais d’une forme qui contient aussi le caractère de l’activité interne la plus haute. C’est le son articulé, le mot, qui seul nous offre une existence où l’externe et l’interne sont si intimement unis. Par conséquent, vouloir penser sans les mots, c’est une tentative insensée. Et il est également absurde de considérer comme un désavantage et comme un défaut de la pensée cette nécessité qui lie celle-ci au mot. On croit ordinairement, il est vrai, que ce qu’il y a de plus haut, c’est l’ineffable. Mais c’est là une opinion superficielle et sans fondement ; car, en réalité, l’ineffable, c’est la pensée obscure, la pensée à l’état de fermentation, et qui ne devient claire que lorsqu’elle trouve le mot. Ainsi le mot donne à la pensée son existence la plus haute et la plus vraie. »

Selon Hegel, la pensée a besoin des mots car ce sont eux qui lui donnent sa consistance. Hegel va même plus loin dans son raisonnement : il n’y a pas de pensée consciente préexistante à sa mise en mots.

Ainsi, non seulement la pensée mise en mots peut s’extérioriser et s’exprimer, mais elle peut aussi être partagée et donner naissance à un dialogue. Or, dans le véritable dialogue, ce ne sont pas deux pensées qui s’expriment pour se confronter, mais ce sont plutôt deux pensées qui s’entremêlent pour créer un terrain de pensée nouveau.

De plus, la pensée intérieure exprimée dans une langue permet de donner à autrui une vision subjective du monde et du vécu, de partager une interprétation que nous faisons de ce que nous vivons. C’est en ce sens que le linguiste Emile Benveniste dit dans les Problèmes de linguistique générale que « Le langage re-produit la réalité » : le langage est une re-création de la réalité et l’expression dans le langage constitue en soi une démarche artistique. Benveniste remarque que dans toutes les mythologies et religions, le langage tient une place centrale, et la parole apparaît souvent comme un principe créateur du monde (cf. Bible, Evangile selon Saint Jean : « Au commencement était la Parole »), car  « l’homme a toujours senti –et les poètes ont souvent chanté- le pouvoir fondateur du langage, qui instaure une réalité imaginaire, anime les choses inertes, fait voir ce qui n’est pas encore, ramène ici ce qui a disparu ». En ce sens, la réalité existe, et le langage la fait exister à nouveau et sous une autre forme.

Ce pouvoir de re-production de la réalité est enrichi par la maîtrise d’un langage riche en mots, en possibilités de modulation et d’articulation. En effet, plus on possède de vocabulaire, plus on peut être précis dans nos descriptions. Plus on maîtrise les constructions de phrases, mieux on peut formuler des idées complexes, jouant avec les temporalités. Et plus on aime les mots, plus on peut les utiliser, à l’écrit comme à l’oral, pour créer un dessin, une musique, et des images, évoquant une idée, la suggérant sans pour autant la réduire. C’est un des grands plaisirs du poète : jouer avec le langage pour créer la beauté.

Paul Eluard, Capitale de la douleur, « La courbe de tes yeux » (poème écrit à sa muse : Gala)

« La courbe de tes yeux fait le tour de mon coeur,

Un rond de danse et de douceur,

Auréole du temps, berceau nocturne et sûr,

Et si je ne sais plus tout ce que j’ai vécu

C’est que tes yeux ne m’ont pas toujours vu.

 

Feuilles de jour et mousse de rosée,

Roseaux du vent, sourires parfumés,

Ailes couvrant le monde de lumière,

Bateaux chargés du ciel et de la mer,

Chasseurs des bruits et sources des couleurs,

 

Parfums éclos d’une couvée d’aurores

Qui gît toujours sur la paille des astres,

Comme le jour dépend de l’innocence

Le monde entier dépend de tes yeux purs

Et tout mon sang coule dans leurs regards. »

En un mot, philosophons!

Concevoir un site comme celui-ci avec WordPress.com
Commencer