« L’homme est condamné à être libre » Sartre

Mais que signifie « l’homme est condamné à être libre » ?

Cette phrase oxymorique apparaît dans l’opuscule L’existentialisme est un humanisme de Jean-Paul Sartre. Dans cette œuvre, Sartre synthétise sa conception de l’existence et de la liberté humaines.

Pour bien comprendre la notion d’« existentialisme », il faut éclaircir l’opposition entre les notions d’ « essence » et d’ « existence ».

En philosophie classique, le terme « essence » renvoie à ce que la chose est, par définition. Pour définir ce terme, Sartre donne un exemple : le coupe-papier. L’essence de cet objet réside dans le fait de couper du papier. Cette essence de couper du papier fait que le coupe-papier est un coupe-papier.

Selon Sartre, la notion d’  « essence » convient pour des objets dont la fonction est déjà déterminée, mais ne convient pas du tout pour l’homme. En effet, dire de l’homme qu’il a une « essence », ce serait nier l’enfermer dans une vision fermée de la « nature humaine ».

Or, l’homme est fondamentalement libre. Son existence n’est pas un déroulement prédéterminé d’un programme écrit à l’avance (comme peut l’être aujourd’hui un programme informatique par exemple). L’existence humaine se construit au cours de son déroulement : « l’homme est ce qu’il se fait ». L’homme ne subit pas son existence, il en choisit tous les aspects. En ce sens, Sartre propose de définir l’existentialisme par cette phrase : « L’existence précède l’essence ». Cette phrase signifie que l’homme n’est rien avant d’avoir vécu. On ne pourra dire ce qu’il a été qu’après qu’il a existé.

Remarque : l’idée que l’homme n’est rien au départ, Sartre la reprend à un mythe grec classique : le mythe de Prométhée. Dans ce mythe, Epiméthée, frère de Prométhée, distribue une qualité à chaque espèce pour lui permettre de survivre mais il oublie l’homme. L’homme naît nu et sans défenses. Pour pallier cette déficience, Prométhée vole le feu, symbole de la culture et de la technique, aux dieux.

Mais Sartre ne se contente pas d’affirmer que l’homme est libre et qu’il n’a pas d’essence. Sartre ajoute que cette liberté est effrayante (cf. Kierkegaard, le concept de l’angoisse : « l’angoisse est  le vertige de la liberté ») et que l’homme a tendance à la fuir. Les moyens que l’homme utilise pour nier sa liberté sont nombreux : il se trouve sans cesse des excuses pour ne pas faire qqch ou pour justifier ses actions, et il s’enferme dans une essence (expl : « je ne peux pas faire du théâtre car je suis de nature timide »). Cette attitude de fuite est nommée « mauvaise foi ».

Lorsque Sartre énonce que « l’homme est condamné à être libre », il dit à la fois que l’homme est fondamentalement libre, mais il formule aussi un paradoxe : la seule liberté que l’homme n’a pas, c’est de nier sa liberté. Autrement dit, l’homme choisit tous les aspects de son existence, mais il ne choisit pas d’exister. Une fois « jeté dans le monde », l’homme est « responsable », c’est-à-dire qu’il est libre, qu’il ne doit pas se trouver des excuses, et qu’il doit assumer les conséquences de ses actes. Cette idée peut paraître angoissante, car elle nous engage pleinement dans le monde, mais elle est aussi d’une richesse inouïe car c’est en assumant notre liberté et en étant responsable que nous pouvons être hommes.

En un mot, philosophons!

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