Raison et croyance

RAISON ET CROYANCE 

DEFINITIONS :

  • Raison = faculté qui permet de connaître, de distinguer le vrai et le faux, le bien et le mal.
  • Croire = considérer comme vrai ou existant sans pouvoir le justifier
  • Savoir = considérer comme vrai ou existant et pouvoir l’expliquer ou le démontrer
  • Foi = croyance subjective en un ou plusieurs principes supérieurs qui guident la vie humaine
  • Fanatisme = croyance qui se prend et qui s’impose comme un savoir objectif

 REPERES CONCEPTUELS :

  • Croire/ savoir 
  • Subjectif/ objectif 
  • Absolu/ relatif

 Introduction : Lecture des horoscopes. Force de la croyance : nous faire considérer comme vrai qqch que l’on ne peut pas prouver, parce que cette chose nous rassure et donne du sens. Mais quand on recherche la vérité par une méthode rigoureuse, la croyance est peu fiable car elle est souvent infondée et instable.

  • Problématique du cours : alors que la croyance est moins rationnelle et plus fragile que le savoir, ne doit-on pas cependant reconnaître que nous avons besoin de croire et que la croyance est indispensable pour aborder certaines questions ?

I) Les raisons pour lesquelles nous croyons sont nombreuses : l’importance et les dangers des croyances

A) Dans la vie quotidienne, il nous faut souvent agir rapidement

Distinction entre le domaine de la vie quotidienne et le domaine de la connaissance. Dans la vie, il faut souvent être efficace dans nos actions, et nous devons faire confiance à nos sens et à nos croyances. Mais dans le domaine de la connaissance, les croyances sont insuffisantes et nous devons utiliser notre raison pour connaître les choses telles qu’elles sont (objectivement et non subjectivement).

Référence : Platon, Menon : différents degrés de connaissance : l’ignorance, l’opinion, l’opinion vraie et la connaissance. Quand il faut agir rapidement, on peut se fier à une connaissance mais aussi à une opinion vraie. Par contre, quand on veut savoir ce qu’est une chose réellement, l’opinion est trop instable, seule la connaissance est assez solide et fiable (car « la connaissance est lien »).

Exemple (donné par Platon) : quand on me demande la route pour me rendre quelque part, je peux répondre que je ne sais pas (ignorance), que je crois que c’est là-bas (opinion et opinion vraie) ou que je sais que c’est là-bas (connaissance : je peux le justifier).

B) Croire est plus facile et demande moins d’efforts que connaître

Tous les hommes sont capables de connaître mais ils se contentent souvent de l’opinion parce que la connaissance prend du temps, exige beaucoup d’efforts et de réflexion, et parce que tous les hommes ne font pas le même usage de leurs facultés.

Référence : Descartes, Discours de la méthode : la raison est une faculté partagée par tous mais « ce n’est pas assez d’avoir l’esprit bon, le principal est de l’appliquer bien ». Les hommes sont libres de faire un bon ou un mauvais usage de leur raison, cad de chercher à construire une idée solidement  ou de se contenter d’adhérer à une idée sans être capable de l’expliquer ou de la justifier.

Analogie avec un outil technique : on peut utiliser un outil de différentes façons, bonnes ou mauvaises (expl : manipuler le génome humain pour guérir des maladies génétiques, ou pour modifier des caractéristiques physiques de son futur enfant).

Les hommes seraient donc tentés de croire plutôt que de chercher à savoir, à cause de leur manque de volonté et de courage.

Référence : Kant, Qu’est-ce que les Lumières ? : les hommes, par « paresse et lâcheté », restent volontairement dans un état de minorité et de dépendance pour ne pas avoir à penser par eux-mêmes. Les Lumières ont en ce sens pour but de les faire réagir et de devenir autonomes (« sapere aude » « aie le courage de penser par toi-même »).

Exemple : aujourd’hui sur internet, les fake news se répandent très rapidement car de nombreuses personnes se contentent de lire des titres attrayants et de partager des articles sans être allés voir leur contenu.

 C) Croire nous rassure mais nos croyances sont fragiles et peuvent être manipulées

Nous avons un attachement affectif à nos croyances, ce qui fait qu’il est difficile de les remettre en question.

Référence : Levi-Strauss, « Le père Noel supplicié » (article de 1952) : si la croyance au Père Noel persiste malgré la diminution du nombre de croyants, c’est parce que le fait de croire et de faire croire est source de plaisir. Analogie avec les katchinas des Indiens du sud-ouest des Etats Unis. Les adultes font croire aux enfants pour maintenir l’espoir, l’émerveillement, mais aussi l’obéissance (« si tu n’es pas sage… »).

L’infériorité de la croyance par rapport au savoir est renforcée par le fait que la croyance, fondée sur une ignorance, peut se transformer en superstition lorsque la peur y est associée. Or, les hommes sont très influençables et très facilement manipulables quand ils ont peur. Cela peut entraîner des comportements irrationnels.

Référence : Spinoza, Traité théologico-politique : pour donner du sens à ce qu’ils ne comprennent pas, les hommes inventent des histoires auxquelles ils croient et ils font croire en manipulant l’espoir et la crainte.

Expl : croire que l’orage vient de la colère de Dieu

 TRANSITION : les croyances sont fragiles et peuvent être dangereuses mais elles nous donnent aussi des raisons de vivre. De plus, toutes les croyances n’ont pas le même degré de rationalité et, dans certains domaines, le savoir est impossible.

 II) Les croyances n’ont pas toutes le même degré de rationalité, et la croyance est le seul moyen d’aborder certains domaines.

A) Distinction entre « croire que » et « croire en »

Croire, ce n’est pas seulement avoir une opinion sur qqch, c’est aussi adhérer librement et subjectivement à une idée qui n’est pas accessible par le savoir. En effet, certaines choses sont indémontrables. Dans certains domaines, sur la question de l’existence de Dieu par expl, prétendre savoir est inutile, voire dangereux (dérive de la religion en fanatisme).

Référence : Kant, Critique de la raison pure, préface : connaître, c’est vérifier une hypothèse théorique par le recours à l’expérience sensible. Pour un être comme Dieu, on ne peut pas en faire l’expérience sensible, on ne peut donc pas le connaître. On peut croire en Dieu mais il est absurde de prétendre savoir que Dieu existe : les questions métaphysiques, il faut donc « mettre de côté le savoir et laisser place à la croyance ».

 B) La foi religieuse

Foi = certitude subjective associée à une incertitude objective.

Rôle moteur au niveau individuel pour surmonter la peur de la mort ou pour donner un sens à la moralité de nos actions.

Rôle unificateur collectivement : union des hommes autour de lieux, rituels, fêtes, pèlerinages communs.

Référence : Durkheim, Les formes élémentaires de la vie religieuse : « la religion est une chose éminemment collective. »

 Cependant, la foi peut aussi être destructrice pour l’individu : à force de croire, il s’enferme dans l’illusion et vit dans l’angoisse d’être surveillé.

Référence : Marx, Pour une critique de la philosophie du droit de Hegel : « la religion est l’opium du peuple », comme une drogue qui serait donnée aux travailleurs exploités pour accepter la misère de leur vie actuelle en espérant l’accès au paradis.

De plus, au niveau collectif, les religions sont aussi sources de divisions. Paradoxes : toutes les religions portent des messages de paix et de tolérance mais les croyants se font la guerre entre eux.

Expl : Projet Face2face du street artiste JR sur le mur entre Israel et la Palestine : les croyants juifs et musulmans sont affichés côte à côte de chaque côté du mur.

Foi religieuse ambivalente : à la fois motrice et destructrice. Liberté de foi dans la sphère subjective et nécessité de tolérance.

C) Les dangers du prétendu savoir

Le plus dangereux, ce sont les croyances qui se prennent pour des connaissances.

Risques des sectes et du fanatisme.

Référence : Voltaire, Dictionnaire philosophique portatif, « Fanatisme » : « Que répondre à un homme qui vous dit qu’il aime mieux obéir à Dieu qu’aux hommes, et qui en conséquence est sûr de mériter le ciel en vous égorgeant ?».

 De façon plus générale, il faut se méfier de tout énoncé qui prétend être une vérité absolue. Même en sciences, les énoncés sont vrais en un sens relatif et provisoire et non absolu.

Référence : Karl Popper, La logique de la découverte scientifique : critère de falsifiabilité pour distinguer une science et une pseudo-science.

Dangers de l’enfermement dans la certitude. Humilité du savoir, que l’on doit soumettre au doute permanent.

Référence : Hume, Enquête sur l’entendement humain : « il y a un degré de doute, de prudence et de modestie qui, dans les enquêtes et les décisions de tout genre, doit toujours accompagner l’homme qui raisonne correctement. »

En un mot, philosophons!

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